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On pourrait croire que, depuis la loi du 13 juin 1866, l’usage des dépêches chiffrées est entré dans les habitudes du public ; il n’en est rien. Sur les huit mille expéditions journalières du bureau central, la moyenne des télégrammes secrets est de huit, et, c’est un fait à noter, presque tous sont adressés à Alexandrie ou à Constantinople[1]. Cette loi, qui est libérale et qui, comme telle, mérite d’être approuvée, est en réalité assez insignifiante. La dépêche secrète a existé de tout temps. Des phrases ayant un sens plausible, convenues d’avance entre deux correspondants, peuvent parfaitement tenir lieu de chiffres. — Orsini l’a bien prouvé ; c’est le télégraphe électrique qu’il avait chargé de préparer son horrible complot : acheter la maison, voulait dire : tuer l’Empereur ! Qui pouvait s’en douter ? Je suis persuadé que les neuf dixièmes des opérations commerciales et financières que la province fait sur le marché de Paris sont commandées par des dépêches qui signifient tout autre chose que ce qu’elles ont l’air de dire.

Les appareils employés aux transmissions électriques sont de trois espèces : l’appareil à cadran, qui ressemble assez exactement à un tourniquet pour tirer les macarons, est presque exclusivement réservé au service des chemins de fer ; il porte l’indication des lettres de l’alphabet, les dix premiers chiffres et les signes de la ponctuation ; une aiguille y désigne les lettres successives qui doivent former les mots et les phrases communiqués. Le procédé est fort simple et peut être facilement expérimenté sans études préalables ; c’est là surtout ce qui le rend précieux dans les gares. Au télégraphe français a succédé l’appareil Morse. L’Europe entière se servait déjà de ce dernier, que nous avions conservé, par

  1. La faculté d’expédier des télégrammes secrets, absolument supprimée aussitôt après la déclaration de guerre en 1870, vient d’être rendue aux particuliers (mai 1875).