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deux années révolues, elle fût lavée et écurée une seule fois, aux frais mêmes du prisonnier ; tant ce moine, jaloux de la crasse et de ses ordures, avait peur que la propreté ne vint à régner dans le plus petit retrait de son couvent. Il n’est qu’un homme de sa profession qui pût ne pas rougir d’une si fière indécence et de tant d’audace d’incivilité sociale : qu’on pardonne ici à M. du Calvet, de rappeler la caricature sous laquelle le fameux Voltaire peignait, dans leur vrai coloris, tous ces torchons monacaux dans La Pucelle,

cochon de Saint-Antoine,
ce sacré porc, emblème de tout moine.

Le dépérissement de la santé de M. du Calvet, qu’un dégoût général précipitait vers la phtisie, lui fit juger que quelques bassins de bouillon devenaient le seul restaurant nécessaire et propre à suspendre l’activité du mal ; mais le Cerbère des Récollets, qui, assis autour d’une table friande servie en grande partie aux frais du gouvernement, appelait tout les jours de sa règle pénitente, crut devoir faire une amende honorable à sa règle violée en chargeant un étranger de la pénitence de tout son couvent. Il renia donc, sur un ton rébarbatif, cette légère douceur, quoique le prisonnier s’offrit à la payer journellement au prix de six livres tournois. Ce n’est qu’avec le dernier regret que ces traits infamants échappent à la plume de M. du Calvet : il est protestant de naissance, d’éducation et de principes ; mais le fanatisme n’entre pour rien dans sa créance religieuse ; et il goûterait un plaisir