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LES AMAZONES,

De mon illuſion je déteſte la ſource :
Et le comble des maux en terminant ma courſe,
Eſt d’avoir un moment vû ton ſexe orgueilleux
Regner ſur un climat ſi rebelle à ſes vœux.
Moi, dont le bras dompta la fortune ennemie,
Faut-il que par l’amour aux mortels aſſervie,
Je cède à ces Tyrans que j’ai tant combattus ?
Une foibleſſe hélas ! ternit mille vertus.
Puiſſes-tu quelque jour reſſentir mon Martyre,
Languir dans le mépris qu’un feu jaloux inſpire,
Voir tes États gémir ſous un pouvoir nouveau,
Et dans ton déſeſpoir te plonger au tombeau,

Elle ſe tue.

Je t’en donne l’exemple ; imite mon courage.
Ménalippe, regnez sur ce triſte rivage ;
Maîtreſſe de vos ſens, vous ſçaurez mieux que moi ;
Gouverner un État dont j’ai trahi la loi.
En acceptant mon Sceptre, épouſez mon offenſe,
Que j’emporte aux Enfers, l’eſpoir de la vengeance.
Bravez ce fier vainqueur, que la poſtérité…
Je meurs… & le trépas me rend la liberté ;
Qu’on m’ôte de ces lieux.