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qui me donnoit espoir de pouvoir avecques mediocre labeur y gaingner quelque ranc, si non entre les premiers, pour le moins entre les seconds, je voulu bien y faire quelque essay de ce peu d’esprit que la Nature m’a donné. Voulant donques enrichir nostre vulgaire d’une nouvelle, ou plustost ancienne renouvelée poësie, je m’adonnay à l’immitation des anciens Latins, et des poëtes Italiens, dont j’ay entendu ce que m’en a peu apprendre la communication familiere de mes amis. Ce fut pourquoy, à la persuasion de Jaques Peletier, je choisi le Sonnet et l’Ode, deux poëmes de ce temps là (c’est depuis quatre ans) encores peu usitez entre les nostres : étant le Sonnet d’italien devenu françois, comme je croy, par Mellin de Sainct Gelais, et l’Ode, quand à son vray et naturel stile, representée en nostre langue par Pierre de Ronsard. Ce que je vien de dire, je l’ay dict encores en quelque autre lieu, s’il m’en souvient : et te l’ay bien voulu ramentevoir, lecteur, afin que tu ne penses que je me vueille attribuer les inventions d’autruy. Or, afin que je retourne à mon premier propos, voulant satisfaire à l’instante requeste de mes plus familiers amis, je m’osay bien avanturer de mettre en lumiere mes petites poësies : après toutesfois les avoir communiquées à ceux que je pensoy’bien estre clervoyans en telles choses, singulierement à Pierre de Ronsard, qui m’y donna plus grande hardiesse que tous les autres, pour la bonne opinion que j’ay tousjours eue de son vif esprit, exact sçavoir, et solide jugement en nostre poësie françoise. Je n’ay pas icy entrepris de respondre à ceux qui me voudroient blasmer d’avoir precipité l’edition de mes œuvres, et, comme on dict, avoir trop tost mis la plume au vent. Car si mes ecriz sont bons, ma jeunesse ne leur doibt oster leur louange meritée. S’ilz ne sont tels, elle doibt pour le moins leur servir d’excuse : d’aultant que si j’ay faict en cet