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LXXVIII
La Canicule, au plus chault de sa rage
Ne faict trouver la fresche onde si belle,
Ny l’arbrisseau si doulcement appelle
Le voyageur au fraiz de son ombrage :
La santé n’est de si joyeulx presage
Au lent retour de sa clerté nouvelle,
Que le plaisir en moy se renouvelle,
Quand j’apperçoy l’angelique visage.
Soit qu’en riant ses levres coralines
Montrent deux rancz de perles cristalines,
Soit qu’elle parle, ou danse, ou bâle, ou chante,
Soit que sa voix divinement accorde
Avec’ le son de la parlante chorde,
Tous mes ennuiz doulcement elle enchante.
  
LXXIX
Du ciel descend tout celeste pouvoir,
Pour decorer cet’ame bien heureuse,
Qui dessus toy ma terre plantureuse,
Comme un Phenix faict ses aesles mouvoir.
Le Dieu de Loire enflammé de la voir
Ard jusq’au fond de son oncle plus creuse.
O grand’ beauté, ô puissance amoureuse,
Qui faict aux eaux nouveau feu concevoir !
S’elle est à rive, il semble que les fleuves
Tardent leurs cours : s’elle erre par les bois,
Les chesnes vieulx en prennent robes neufves.
Le ciel courbé se mire dans ses yeulx :
Echo respond à sa divine voix,
Qui faict mourir les hommes, et les Dieux.