Les bastimens, si est-ce que le temps
Œuvres et noms finablement atterre.
Tristes desirs, vivez donques contents :
Car si le temps finist chose si dure,
Il finira la peine que j’endure.
VIII
Par armes et vaisseaux Rome donta le monde,
Et pouvoit-on juger qu’une seule cité
Avoit de sa grandeur le terme limité
Par la mesme rondeur de la terre, et de l’onde.
Et tant fut la vertu de ce peuple feconde
En vertueux nepveux, que sa postérité
Surmontant ses ayeulx en brave auctorité,
Mesura le haut ciel à la terre profonde.
Afin qu’ayant rangé tout pouvoir sous sa main
Rien ne peust estre borne à l’Empire Romain,
Et que, si bien le temps destruit les Republiques,
Le temps ne mist si bas la Romaine hauteur,
Que le chef deterré aux fondemens antiques,
Qui prendrent nom de luy, fust descouvert menteur.
IX
Astres cruels, et vous Dieux inhumains,
Ciel envieux, et marastre Nature,
Soit que par ordre, ou soit qu’à l’aventure
Voise le cours des affaires humains,
Pourquoy jadis ont travaillé vos mains
A façonner ce monde qui tant dure ?
Ou que ne fut de matiere aussi dure
Le brave front de ces palais Romains ?
Je ne di plus la sentence commune,
Que toute chose au-dessous de la Lune
Est corrompable, et sujette à mourir :
Mais bien je di (et n’en vueille desplaire
A qui s’efforce enseigner le contraire)
Que ce grand Tout doit quelquefois perir.
X
Plus qu’aux bords Æteans le brave fils d’Æson,