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Mais florira trop mieux, que la couronne
De son Printemps, qui maintenant fleuronne.
Excusez donc ma puissance peu haute
Imitant ceux qui, n’ayant de rien faute
Prennent en gré l’humble présent des hommes,
Mesmes le Dieu de ce mois où nous sommes,
Clavier de l’an, qui rien plus ne demande
Que miel et palme et tigues pour offrande.
Le cœur sans plus les Deitez contente :
Et c’est le don lequel je vous présente.


DISCOURS AU ROY SUR LA TRESVE DE L’AN M. D. LV.

SONNET

Le Ciel voulant tirer d’une rigueur cruelle
Une humaine douceur, d’un orage un beau temps.
D’un hyver froidureux un gracieux printemps.
Et d’une longue guerre une paix éternelle,
Permit que le discord, d’une fureur nouvelle
Vînt arracher des mains des deux Rois plus puissans
La Tresve qui entre eux devoit durer cinq ans,
Pour après assopir toute vieille querelle.
Puis donc que le ciel veut se montrer plus bénin
Et qu’il a contre nous vomi tout son venin ;
Recevons désormais le bien qui se présente :
Renouons cest accord d’une plus forte main,
Prenons l’heure aux cheveux, l’homme r’appelle en vain
La sourde Occasion, alors qu’elle est absente.
Comme on voit de chasseurs une bande peureuse,
Trouvant du fier Lyon la femme généreuse,
Avecques ses petits, de la frayeur qu’elle a,
Sans passer plus avant, se retirer de là.
Et puis se rasseurant d’une tremblante audace,
S’approcher peu à peu pour luy donner la chasse.
Faire une longue enceinte, et de cris et d’abbois
Ressonner tout autour les antres et les bois :
Et comme à ce grand bruit la magnanime beste
Craintive pour les siens, vient à lever la teste,