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riez véritablement que cet ordre ressemble à ce sénat romain dans lequel l’ambassadeur de Pyrrhus crut voir une assemblée de dieux et de demi-dieux. Il n’est question là-dedans que de protester contre l’injustice, « de protéger la liberté, la fortune, la vie des citoyens, d’où que vienne l’attaque, qu’elle se produise dans les sociétés paisibles ou troublées, sous le despotisme ou sous le règne de la loi. » On y rappelle les paroles de Target qui, du reste, fut peu brillant lors du procès de Louis XVI : « C’est par l’honneur que se maintient l’honneur, tout ce qui blesse la délicatesse est un crime à nos yeux ; ce qui est permis aux autres ordres de citoyens doit être interdit à celui-ci. »

Parcourez même ce qu’on a écrit à l’occasion de l’élévation de Le Berquier au bâtonnat. Il semble que cet homme soit la personnification même de l’indépendance et de la vertu. On pense à ce grand chancelier, Thomas Morus, qui, captif à la Tour, vit un jour arriver sa femme et ses enfants. — Signez cette rétractation et vous êtes libre ! Le prisonnier réfléchit une minute. Il songea à ce que serait le réveil le lendemain s’il refusait, à ce moment où il faudrait poser sa tête blanche sur le bloc de bois mal équarri, sur l’affreux billot de chêne qu’on montre encore à la Tour. Puis il demanda à sa femme combien elle croyait qu’il eût encore de temps à vivre. — Mais dix ans, quinze ans, peut-être. — Eh bien, faut-il sacrifier l’Eternité au plaisir de passer ces quelques années avec les miens ?

Ainsi ceux qu’au XVIII on appelait déjà les élogistes, les gens qui louent sans même savoir pourquoi, multipliaient les dithyrambes et accumulaient les épithètes à propos du nouveau bâtonnier.

Il est certain, cependant, que rien ne ressembla moins à un tel portrait que Le Berquier. Un avocat, capable d’être bâton-