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parfaitement compris que le comte de Chambord était de ces hommes qu’il faut jeter à l’eau pour les décider à nager. Il lui aurait donné rendez-vous, il l’aurait invité à déjeuner, il lui aurait fait boire un verre de champagne à la santé de la France, il aurait prévenu deux ou trois régiments de cavalerie dont tous les officiers étaient ardemment légitimistes, puis, brusquement, il aurait montré le souverain aux troupes. Cette fois encore on aurait crié à tue tête : Vive le Roi ! Le centre droit et le centre gauche auraient eu beau se réunir pour paperasser pendant des heures entières dans des commissions, ils n’auraient rien pu contre le fait accompli. Nous aurions quelques milliards de dette de moins aujourd’hui, et la France, au lieu d’être un objet de pitié pour les nations, serait redevenue l’arbitre de l’Europe.

Le maréchal Mac-Mahon n’était ni gai, ni franc, il couvait déjà solitairement je ne sais quel songe de présidence à vie, il refusa de recevoir le Roi.

Dans ce pays, qui était jadis le pays des initiatives hardies, des coups de tête, des bravoures endiablées, nul ne bougea. Le seul qui eut vraiment le sentiment de sa mission, le héros que la France attendait, le Prince Impérial était trop jeune, et sans doute il se disait en Angleterre « Si j’étais le comte de Chambord ! »

A partir de cette date on ne trouva plus dans le parti monarchique, pour employer une expression de Saint-Simon, que « cacades, paroles de neige et pistolets de paille. » On retomba dans cette perpétuelle convention qui perd et émascule une époque qui ne demande qu’à être trompée. On parle de soulèvements, de combats, de Vendée sur le papier, on laisse supposer vaguement que l’on conspire pour flatter l’abonné au moment des renouvelle-