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les jours s’écoulaient, semblaient comme l’image de cette existence, comme le symbole de cette Monarchie de dix siècles, dans laquelle la France s’était si complètement incarnée.

L’histoire a cependant des droits, elle dira ce que nous disons : « Le comte de Chambord n’a pas voulu régner. Aux âges passés, le matin du sacre, l’archevêque de Reims allait frapper à la porte de la chambre occupée par le roi dans les appartements du Chapitre. — Le roi dort ! Répondait le grand maître des cérémonies. — Eveillez-le, disait l’archevêque. En 1873, la France a frappé à la porte de la chambre du roi, mais le roi ne s’est pas réveillé !

Si quelques écrivains, comme le dit Carlyle, regardent l’histoire comme une réunion de petites fioles étiquetées d’avance et dans lesquelles on fait entrer les faits, d’autres, au contraire, et nous sommes de ce nombre, veulent surtout dans l’histoire étudier des hommes, voir des êtres.

Quelle étude plus passionnante que celle-là quand, sans s’arrêter aux figures de convention que la consigne de chaque parti entend imposer, bon gré mal gré, à l’opinion, on se met dans la peau des gens, on s’efforce de deviner ce qu’ils ont pensé, ce qu’on aurait pensé peut-être à leur place !

Un mot suffit à peindre le comte de Chambord, le mot de Goethe sur Hamlet :

« C’est une âme chargée d’un grand dessein et incapable de l’accomplir. »

Nulle âme de roi ne fut plus haute, plus généreuse, plus droite, mais le tempérament n’y était pas. On voit, comme à travers du cristal, les combats qui se livrent dans ce cœur. Dès que l’occasion se présente, le comte de Chambord s’ingénie à chercher un prétexte, il essaie de gagner