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magne qu’attestait l’hôtelier chez lequel on avait transporté Beaumarchais blessé. Mais une certaine école qui a pris à tâche de déshonorer tous les chrétiens, pour faire des Juifs autant de petits saints, ne doute de rien.

M. d’Arneth, qui a publié à Vienne quelques documents sur Marie-Antoinette d’une authenticité assez contestable, s’avisa de prétendre, dans une brochure intitulée : Beaumarchais und Sonnenfels, que Beaumarchais avait joué une indigne comédie, qu’il avait fabriqué le pamphlet lui-même, que le Juif Angelucci n’avait jamais existé.

M. Paul Huot traduisit cette brochure en 1869, sous ce titre : Beaumarchais en Allemagne, sans que personne prêtât grande attention à ce paradoxe.

Ce qui m’étonne c’est de voir un érudit comme M. Auguste Vitu ne pas craindre d’adopter cette singulière version, dans l’excellente introduction qu’il a mise en tête du Théâtre de Beaumarchais publié par Jouaust.

C’est chose grave, après tout, que d’accuser d’une action aussi basse un écrivain qui, de quelque façon qu’on juge la portée de son œuvre, n’en a pas moins honoré la France par son talent. Sur quoi M. Vitu se fonde-t-il pour accepter les dires de M. d’Arneth ? J’admets pour une minute que Beaumarchais ait été l’homme que nous peint ce dernier d’une plume selon moi calomniatrice. Il avait fait fabriquer un libelle, il avait reçu 75,000 livres pour le racheter, le coup était réussi, il n’avait plus qu’à revenir en France. Pourquoi courir en Allemagne à la recherche d’Angelucci ? Pourquoi, en imaginant l’histoire d’un exemplaire échappé, donner une si piètre idée de son habileté au moment où il ambitionnait des missions diplomatiques ?

A mon avis M. Vitu a manqué de sens critique en se prononçant contre un compatriote, sans rechercher les motifs