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l’enseigne du Soleil d’Or. Ils payaient au propriétaire cinquante francs pour le corps d’une grande personne.

Le propriétaire, le sieur Matard, exploitait impitoyablement ces Parias, il les insultait dans leurs plus chères croyances, il faisait écorcher des bœufs et des chevaux dans la terre destinée aux inhumations, il mêlait la chair et les ossements de ces animaux aux cadavres, il troublait les Juifs dans leurs cérémonies funèbres et les menaçait de ne plus recevoir leurs morts.

N’est-ce point saisissant ce contraste d’hier et d’aujourd’hui ? Regardez ces malheureux, qui s’en vont furtivement dans un faubourg perdu de Paris, n’ayant pas même un lieu pour pleurer, pour dire en paix le Kaddish des veuves et des orphelins, pour réciter la prière : « O Éternel, rocher des mondes, Dieu qui vit et subsiste à jamais, toi plein de pitié, toi qui pardonnes les offenses et effaces les iniquités, je t’implore pour l’âme de celui qui vient de mourir. » — Avant qu’un siècle ne soit écoulé, ils seront les maîtres de ce brillant Paris, à travers lequel ils se glissent comme des ombres, ils auront les palais, les chevaux fringants, les loges à l’Opéra, l’autorité, ils auront tout. En ce coin même de la Villette s’élèveront les usines d’Halphen où trois mille ouvriers chrétiens pliant sous le labeur sans trêve, étouffant dans une atmosphère de cinquante degrés, menés au bâton comme les constructeurs des Pyramides, crachent le sang dès quarante ans pour que cet homme ait un peu plus d’or…

j’ai voulu revoir ce cimetière qui existe encore, et j’ai retrouvé 44, rue de Flandres, le Soleil d’Or tel à peu près qu’il était autrefois. Quoique l’hôtellerie ait disparue, l’immeuble a gardé son nom et les quittances du propriétaire,