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chafouin d’Alphonse de Rothschild qui passe, lugubre, à travers Paris avec son blafard faciès d’allemand ? C’est à toi-même que je le demande, baron, qu’avons nous gagné au change ? Tu prends l’argent comme Lauraguais et tu en prends davantage, seulement Lauraguais, avec ses saillies, m’aurait au moins diverti, et toi tu ne m’amuses pas…

Il n’y a pas de médaille sans revers et de victoire sans inconvénients. La conquête de l’Alsace avait, elle aussi, apporté à la France une quantité considérable de Juifs dont elle se serait bien passée.

Très nombreux en Alsace, les Juifs y étaient fort durement traités. Ils dépendaient non du souverain directement mais des seigneurs qui, cependant, par un contraste singulier, avaient le droit de les recevoir et non de les expulser. Ils devaient payer, outre le droit d’habitation, montant d’ordinaire à 36 livres par an, un droit de réception fixé à peu près à la même somme, ils étaient, en outre, assujettis à des droits de péage. A la suite d’une sédition qu’ils avaient excitée en 1349, ils n’avaient pas la faculté de séjourner à Strasbourg et payaient un impôt toutes les fois qu’ils entraient dans la ville.

La réunion de Strasbourg à la France améliora un peu leur situation. A partir de 1703, dit M. A. Legrelle dans son livre Louis XIV et Strasbourg, les autorités françaises insistèrent pour qu’on se relâchât de ces antiques usages parce que des marchands israélites avaient accepté d’elles la charge de fournitures militaires. La guerre finie, le Sénat dut tolérer encore, pour les mêmes motifs, un fournisseur appartenant à la confession proscrite, Moïse Blien. Ce revirement, dont bénéficia aussi la famille Cerfbeer, attira si bien les Juifs qu’avant 89 on en comptait vingt mille dans le pays, possesseurs de 12 à 15 millions de créances.