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fonde la célèbre école d'exégèse de Champagne. Nicolas de Lire lui emprunta plus tard beaucoup de ses arguments contre l'Église et ses arguments se transmirent à Luther, « Raschi et les Tosaphistes, dit Renan, firent Nicolas de Lire, Nicolas de Lire fit Luther. » Renan lui même a puisé au même arsenal et les quelques objections spécieuses contre le christianisme qui se rencontrent dans ses livres lui ont été soufflées par Neübauer qui lui a fourni presque entièrement les matériaux pour son étude sur les Rabbins de France au commencement du XIVe siècle[1].

Les rabbins, surtout dans le Midi, étaient également poètes, et ici nous pouvons constater la sécheresse du génie juif une fois qu'il n'a plus été inspiré par les oliviers de la patrie et les fraîches vallées du Jourdain. Ceux qu'on a appelés les Pères de la Synagogue, le provençal Berakhia ben Natronaï, le rabbin de Lunel Jehonhatan ben David,

  1. On consultera avec fruit sur ce sujet, outre le travail de Renan publié dans le tome XXVII, de la France littéraire : les Juifs du Languedoc, de M. Gustave Saige. L'ouvrage atteste de sérieuses recherches, mais on y regrette l'absence de tout point de vue philosophique, la comparaison entre le passé et le présent, qui, seules donnent du prix et de l'utilité à l'histoire qui autrement n'est qu'une compilation de documents.
        L'auteur semble accepter cette fable du Juif, tout à coup persécuté par des gens auxquels il n'aurait rien fait. Ou sent, en un mot, à chaque page, la timidité de quelqu'un qui n'ose pas écrire une ligne qui puisse lui nuire près des maîtres du jour. Cette crainte perpétuelle apparaît chez tous nos érudits préoccupés de leur avenir, sauf quelques exceptions comme M. Valois, qui a parlé avec netteté et bon sens de l'affaire du Talmud, elle constitue notre jeune école historique à l'état d'infériorité vis-à-vis de l'étranger, et particulièrement de l'Allemagne, qui ose dire au juif: « Voilà qui tu es, voilà le mauvais tour que tu as voulu jouer aux chrétiens qui ont usé de représailles envers toi. »