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rémonies liturgiques célébraient en ce jour la commémoration. L’analogie fut plus saisissante encore quand, au milieu de ces masses de fidèles, vint à passer la Synagogue de Paris qui voulait rendre honneur au représentant de Celui que les chefs de la Synagogue antique avaient, en des circonstances semblables, voué à la mort. En recevant des mains des rabbins le texte de l’ancienne loi écrit sur un rouleau de parchemin qu’enveloppait un voile précieux, l’apôtre de la loi nouvelle leur dit avec une fraternelle douceur : « Puisse le Dieu tout-puissant arracher le voile qui couvre vos cœurs[1] !

On le voit, la Synagogue avait sa place marquée dans l’organisation de la société d’alors. À moins d’avoir appris l’histoire dans le Manuel de Paul Bert, tout lecteur de bonne foi a pu se convaincre facilement, par le peu que nous avons dit, de l’invraisemblance du roman noir que l’on raconte aux naïfs. Des prêtres très méchants, amis de rois très cupides s’amusant à persécuter des pauvres Juifs à cause de leur religion, — telle est la légende. La vérité, au contraire, est que les Juifs, tant qu’ils ne mirent pas le pays hors de lui par leurs tripotages financiers, leurs trahisons et leurs assassinats d’enfants chrétiens, restèrent relativement plus tranquilles que les chrétiens de la même époque. La foi était cependant aussi vive au commencement du XIe siècle, alors que les monastères s’élevaient de toutes parts, quand le roi Robert le Pieux allait lui-même chanter au lutrin, que cent ans après. La religion n’eut donc aucune part aux mesures dont les Juifs furent l’objet plus tard.

  1. « Nec etiam ipso Judeorum Parisiensium excæcata defuit Synagoga, quæ legis litteram, rotulam scilicet velatam offerens, ab re ejus hanc misericordiæ et pietatis obtint supplicationem : Auferat Deus omnipotens velamen a cordibus vestris. » (Suger édition Lecoy de la Marche.)