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Michel Weil, grand rabbin, dit expressément que les prophéties n’ont jamais fait mention ni d’un descendant de David, ni d’un roi Messie, ni même d’un Messie personnel. Le véritable Rédempteur, selon lui, serait, « non plus une personnalité, mais Israël transformé en phare des nations, élevé aux nobles fonctions de précepteur de l’Humanité qu’il instruira par ses livres comme par son histoire, par la constance dans ses épreuves non moins que par la fidélité à la doctrine ! »

Je ne relèverai pas une fois de plus ce qu’a d’impudemment orgueilleux la prétention de cette bande de manieurs d’écus d’être le phare de nations qui ont eu Charlemagne, saint Louis, Charles-Quint, Napoléon, les plus grands saints, les plus puissants penseurs, les plus hauts génies, les sociétés les plus admirablement organisées. Il y a évidemment là une véritable démence collective, une sorte de folie des grandeurs sévissant non plus sur un individu isolé, mais sur une race tout entière à laquelle des succès soudains ont monté à la tête.

Ces succès, en tout cas, n’ont pas procuré à Israël le bonheur de l’âme.

A mesure que leur rêve s’accomplissait, la portion d’idéal très relatif de spiritualisme religieux qui était en eux diminuait, leur petit lambeau d’infini décroissait. Ces Nucingen avaient, eux aussi, leur peau de chagrin d’un nouveau genre où la notion de la vie future se rétrécissait et se desséchait pendant que leur vie présente devenait plus brillante et plus large.

Leur romanesque espérance de posséder la terre, de jouir seuls de ce que d’innombrables générations de chrétiens avaient fondé, créé, produit, s’était réalisée contre toute vraisemblance. Avec des prospectus aussi fantastiques