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L’Hermitage est le nom d’un ancien couvent caché par des sapins séculaires, qui s’élève au sommet d’une haute montagne dominant Noirétable. Du haut d’un dolmen, venu là, je ne sais comment, aux premiers âges du monde, on aperçoit, par les temps clairs, la cime du Mont-Blanc ; mais le regard ne songe guère à aller chercher si loin ; il se repose émerveillé et ravi sur un incomparable panorama : à droite, les masses épaisses des Bois-Noirs ; à gauche, les montagnes de Vollor ; devant vous, la plaine, avec son damier multicolore, ses blés dorés, ses prés verdoyants, ses avoines, ses seigles. Par-dessus tout, cette impression du ciel que vous croyez toucher en élevant la main, et qui prête à ce paysage, vu de si haut, un aspect particulier.

C’est là que s’installèrent, il y a une vingtaine d’années, quelques Pères du Saint-Sacrement, que la population du pays entourait de vénération. Ils n’étaient pas fort dangereux : car, au moment des décrets, ils étaient trois en tout. Comment les choses se passèrent-elles exactement ? On n’a jamais pu le savoir au juste. Le maire de Noirétable, un médecin, appartenait à une famille bonapartiste tant que l’Empire avait pu distribuer des places, devenue ardemment républicaine dès que le vent avait tourné. C’était, au demeurant, un assez bon homme, et qui semble avoir voulu tout arranger pour le mieux, sans y avoir réussi.

Le 4 novembre 1880, au matin, le sous-préfet de Montbrison, qui répondait au nom de Mauras, vint pour expulser les bons religieux, et il ébaucha une grimace quand il vit l’ascension à accomplir. Chemin faisant, il avait recueilli quelques renseignements désagréables sur les dispositions des paysans, cœurs d’or, mais fort capables de tirer un coup de fusil aux malfaiteurs qui iraient crocheter les portes de religieux inoffensifs, qui