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cette reine qui fut la triomphante de Versailles par l’élégance et le charme plus que par le rang. Elle est fermée à tout sentiment généreux ; elle prélude aux ignominies d’Hébert ; elle insulte cette mère qui est au Temple, cette Chrétienne sublime qui, prête à monter à l’échafaud, employait ses derniers instants, dans le cachot de la Conciergerie, à recommander le pardon aux siens ; elle l’appelle Médicis, elle prétend que devant ses gardes elle faisait réciter à son fils des vers qui se terminaient ainsi :

Et, d’un peuple rebelle abhorrant la noirceur,
Il faut, mon fils, apprendre à lui percer le cœur.

Elle sait qu’elle ment. Que lui importe ? c’est avec ces mensonges qu’on fait tomber les têtes. La bonne nature tient à jouir, jusqu’au bout, de l’agonie de sa victime ; la hyène veut du moins sentir le sang, puisqu’elle ne peut pas le boire.

Un matin d’octobre, un artiste s’installe, une plume et du papier à la main, à une fenêtre de la rue Saint-Honoré. Une femme est à ses côtés, riant, coquetant, étalant ses grâces horribles ; soudain un éclair de joie passe dans les yeux de cette femme : une rumeur a couru dans la plèbe qui attend sa proie ; une charrette apparaît, elle porte à l’échafaud celle qui fut la reine de France. La Furie cependant ne peut dissimuler un mouvement de dépit. Marie-Antoinette est plus majestueuse encore qu’à Versailles. Brisée ce jour-là par une de ces indispositions qui anéantissent les femmes, sous le faix de douleurs qui semblent au-dessus du courage humain, l’infortunée trouve encore la force d’être calme, jusqu’à l’heure, heureusement proche, où, touchant au terme de sa longue agonie, elle criera au bourreau : « Dépêchez-vous ! »