d’honnête famille est perdu : on le grise, on le fait jouer, on le dépouille de mille manières. Jamais peut-être la nature humaine ne fut dégradée davantage que dans ces malheureuses femmes dont la profession est de boire, qui ont l’ivresse pour gagne-pain ; qu’on appelle fainéantes quand leur estomac refuse le travail.
M. Macé adresse rapports sur rapports, demandes sur demandes au préfet de police, pour être autorisé à nettoyer Paris ; il se heurte à un refus formel, et il nous en donne la raison[1].
La majorité du Conseil municipal est d’accord avec les exploiteurs du vice.
Dans certaines élections, ce sont les souteneurs et les repris de justice qui apportent l’appoint de voix nécessaires. Le témoignage de M. Macé est très grave sur ce point. « La plupart des souteneurs sont électeurs et votent ; avec leur carte ils pénètrent partout. Bon nombre ont cependant subi diverses condamnations, ce
- ↑ La police ne touche pas aux souteneurs ; elle se déclare
impuissante vis-à-vis d’eux, pour ne pas avouer qu’elle est complice.
Qu’on se rappelle les scènes qui se passèrent au Quartier Latin au mois d’avril 1883. Quelques étudiants, moins dégénérés que leurs camarades, voulurent accomplir eux-mêmes la besogne dont l’autorité refusait de se charger. En une soirée, ils eurent débarrassé le quartier de la population aquatique qui l’infestait. Que fit le commissaire de police Schnerb, le Juif allemand, le frère du pornographe Schnerb, qui était alors directeur de la Sûreté ? Il se mit à la tête d’une bande de souteneurs et d’agents, et se rua sur les étudiants, qui, roués de coups, ensanglantés, assommés à coups de casse-tête, durent battre en retraite. En d’autres temps, on se fût indigné du cynisme de cette police, faisant cause commune avec les hommes sans nom qui rançonnent les prostituées. Le sens moral est si complètement oblitéré, qu’on se contenta de rire, et d’offrir à Camescasse un casse-tête d’honneur, qui amusa beaucoup le préfet et le honteux entourage au milieu duquel il vivait.