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bien, mais par indifférence, par ignàvie, parce qu’ils sont même incapables du léger effort, de l’attention momentanée qu’il faudrait pour cela.

Ce qu’il y a de douleurs derrière ce luxe sans raison, absolument bête, est incroyable. Le hasard, à chaque instant, nous montre l’envers de ces existences si brillantes en apparence.

J’ai vu une famille de vieille noblesse envoyer chaque jour chercher, chez la crémière d’à côté, un horrible bouillon noir et sentant la graisse. Au bout de quelque temps, ils en devaient pour cinq cents francs ! La femme, qui portait un nom célèbre dans l’histoire de la Révolution, un nom chanté par les poètes, immortalisé à la fois par l’héroïsme et par la pitié, avait une note de dix mille francs chez sa couturière, et s’en allait à travers Paris pour les chercher, avec ce mouvement d’oiseau de grande race qui ne sait pas marcher à pied. Au milieu des querelles et des récriminations grandissait une belle jeune fille, élégante et svelte. N’obéissant qu’à leur bon cœur, ces pauvres gens avaient recueilli un moine expulsé ; et rien n’était baroque comme ce chapelain en appartement, bénissant ce repas pris à la gargote, en tête à tête avec une bonne non payée, qui hurlait les refrains de café-concert qu’elle allait récolter chaque soir.

Parfois on tombe tout à fait. Cette jeune femme adorable, cette ravissante Aryenne, au galbe virginal et fier, que vous n’effleurez même pas d’un regard trop intense, pour ne point enlever le pur duvet de ce fruit en train de mûrir, se vend à quelqu’un de ces cosmopolites affreux, galeux, sentant mauvais, qui ont crié des oranges sur le port de Tunis ou d’Alexandrie, ou qui ont été garçons d’auberge en quelque village de Russie, comme ce Garfounkell, quarante fois million-