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à cet infatigable déclamateur un horoscope qui s’est réalisé de point en point, et qui atteste chez l’écrivain une singulière puissance de prévision.


Gambetta, dit-il, ne fait appel qu’à des instincts ; il ne rallie pas une âme, et il se retrouve toujours au point de départ. Il passera sa vie à recommencer. Il prétend à être le maître de ceux qui n’en veulent plus avoir ; il se croit le dieu de ceux qui n’en ont pas. Rien à craindre, et, ce qui est plus triste encore, rien à espérer de cet homme. Il est purement verbal. Il mourra d’un éclair de vérité, comme son aïeul le cyclope Brontès d’une flèche d’Apollon.


Mais prêtez l’oreille. Une salle entière bat des mains, une salle qui contient tout ce que Paris compte d’illustre, acclame cette œuvre verveuse et hardie de Victorien Sardou, qui, du moins, nous venge un peu par le rire ; Rabagas.

Qu’il est exact encore, le portrait de Daudet, le premier, le vrai, le bon, le portrait avant les retouches ! Comme le Gambetta président de la Chambre est bien resté le Gambetta de la table d’hôte de la rue de Tournon !


Il y avait là une douzaine d’étudiants méridionaux, — mais du vilain Midi, — avec des barbes en palissandre, trop noires, trop luisantes, un accent criard, des gestes désordonnés et de grands nez tombants qui leur faisaient à tous des têtes de cheval.

Mon Dieu ! que ces jeunes Gascons étaient donc insupportables ! Quelle agitation dans le vide, quelle niaiserie, quel aplomb, quelle turbulence ! Un d’eux surtout, le plus criard, le plus gesticulant de la bande, m’est resté particulièrement dans le souvenir. Je le vois toujours arriver dans la salle, le dos voûté, roulant des épaules, borgne avec cela et le visage tout enflammé.

Lui s’asseyait bruyamment, s’étalait sur la table, se renversait sur sa chaise, pérorait, frappait du poing, riait à fendre les vitres, tirait la nappe à lui, crachait loin, se