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titres, alla mourir en Suisse du chagrin d’avoir perdu une si belle partie.

Malgré tout, la France, la vraie France honnête, patriote, travailleuse, désirait tant la Monarchie, elle en avait tant besoin, que la restauration de la Royauté fut bien près de se faire.

En réalité, le seul obstacle, ce fut le comte de Chambord.

Dieu me garde de manquer de respect à cette noble et pure mémoire ! J’ai pleuré à la mort du pauvre petit Prince Impérial plus que la plupart de ceux que l’Empire avait comblés de bienfaits. Je me rappelle encore les heures de tristesse que j’ai passées dans mon jardinet au moment de la maladie du comte de Chambord, devant mes lis, qui, s’affaissant sur leurs tiges à mesure que les jours s’écoulaient, semblaient comme l’image de cette existence, comme le symbole de cette Monarchie de dix siècles, dans laquelle la France s’était si complètement incarnée.

L’histoire a cependant des droits ; elle dira ce que nous disons : « Le comte de Chambord n’a pas voulu régner. »

Aux âges passés, le matin du Sacre, l’archevêque de Reims allait frapper à la porte de la chambre occupée par le roi dans les appartements du Chapitre. — « Le roi dort », répondait le grand maître des cérémonies. — « Éveillez-le », disait l’archevêque.

En 1873, la France a frappé à la porte de la chambre du roi, mais le roi ne s’est pas réveillé !…

Un mot suffit à peindre le comte de Chambord, le mot de Gœthe sur Hamlet : « C’est une âme chargée d’un grand dessein et incapable de l’accomplir. »

Nulle âme de roi ne fut plus haute, plus généreuse, plus droite ; mais le tempérament n’y était pas.