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Une Juive, d’une rare beauté, avait trouvé plaisant de pénétrer dans l’église le jour de Pâques et de cracher dans l’eau bénite. Aujourd’hui, la Belle Juive, à la suite de cet exploit, serait nommée inspectrice générale des écoles de filles ; alors, elle reçut le fouet en place publique, et une inscription commémorative rappela le sacrilège commis et la punition subie.

La colonie juive de Bordeaux avait seule prospéré. Quand l’Espagne, après la défaite définitive des Maures de Grenade, se vit appelée à jouer un rôle en Europe, elle fit ce qu’avait fait la France dès que la monarchie s’était constituée : elle élimina de son sein les éléments qui étaient une cause perpétuelle de trouble. Le 30 mars 1492, le roi Ferdinand d’Aragon et la reine Isabelle de Castille, sur l’avis de l’illustre Ximénès, rendirent un arrêt qui ordonnait à tous les Israélites de sortir du pays.

Quelques-uns de ces proscrits vinrent chercher un asile à Bordeaux. Parmi eux se trouvaient Ramon de Granolhas, Dominique Ram, Gabriel de Tarragera, Bertrand Lopez ou de Louppes, les Goveas, qui se firent assez rapidement comme jurisconsultes, médecins, négociants, une place dans la société de Bordeaux[1].

  1. Ici encore se vérifie ce que nous disions de l’influence du milieu pour le Juif. Malgré leur apparente exubérance, les Bordelais sont, au fond, des gens froids et sérieux comme leur vin. L’Angleterre, qui a occupé si longtemps ces contrées, y a laissé un peu d’elle-même, de son bon sens, de son esprit réfléchi. Les Bordelais, par bien des points, sont des Anglais plus capiteux. Israël, représenté d’ailleurs par des hommes de mérite, ne trouva pas là une population qu’il pût troubler, mais une bourgeoisie très capable d’apprécier les sérieuses qualités commerciales des nouveaux venus. Plus que les lettres patentes de Henri II, les dispositions générales des classes élevées protégèrent les arri-