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L’ÉGYPTE ET LE CANAL DE SUEZ.

lever des hommes était transmis par les gouverneurs de provinces aux chefs de villages, et ceux-ci désignaient sans contrôle et sans appel les fellahs qui devaient marcher pour rejoindre le drapeau. Pouvoir exorbitant dans un pays surtout où la corruption règne comme un des fruits naturels d’une longue oppression !

« Ceux que les chefs de villages désignaient pour le service militaire étaient surtout ceux qui ne pouvaient pas payer pour être exemptés. Il va sans dire que les fils de cheiks échappaient toujours à la nécessité de porter le mousquet. »

On n’agissait pas avec plus de justice pour la levée des impôts : Le cheik-el-beled indiquait ceux qui devaient être principalement poursuivis, ceux qui devaient abandonner au fisc leurs bestiaux, unique propriété du fellah, dernière ressource de la culture de son champ. La cupidité, l’immunité, toutes les passions trouvaient à se satisfaire par l’exercice d’une telle autorité… Quand il s’agissait des corvées d’hommes, des emprunts de chevaux, d’ânes, de chameaux demandés par le gouvernement, le cheik choisissait les hommes, désignait où il fallait prendre les animaux. Bref il était sultan dans son village, et comment n’aurait-il pas abusé