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pour lutter contre le Marché Noir, mais…

— Mais vous comprenez, moi je suis un homme pratique ; pour lutter contre le Marché Noir, j’ai compris tout de suite qu’il fallait se servir de ses armes. J’oblige donc les gens du Marché Noir à me faire des prix pour approvisionner mes cantines et mes soupes. C’est une sorte de taxe que je lève sur eux.

— Très bien, approuva Constant, avec un rire gras.

Et il commença à cligner de l’œil et à loucher comme un homme qui connaît les dessous de la société. L’autre en fut fort encouragé et lui raconta de bonnes histoires.

— Somme toute, conclut Constant, vous connaissez admirablement le mécanisme du Marché Noir dans le département ?

— Vous pouvez dire dans toute la région et au-delà.

— On pourrait même dire que vous êtes un des éléments les plus importants du Marché Noir dans toute la région.

Constant dit cela avec un regard caressant, admiratif.

— Oui, n’est-ce pas, s’esclaffa l’autre.

Il avait dit des noms. Constant téléphona à Paris ; certains de ces noms étaient fort connus des Susini. Constant fut introduit par Boucherond auprès de quelques-uns de ses amis ; il entra en relations avec les gros spéculateurs des produits laitiers, qui finirent par apprendre qui Constant représentait. Quelques jours plus tard, il fut en mesure de causer sérieusement avec Raphaël