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Voici comment Constant avait connu Susini.

Le bistrot était mélangé comme le quartier : il y avait des pauvres et des moins pauvres, des plus rangés et des moins rangés. Les rangés sont un peu dérangés et les dérangés sont assez rangés. Qui pourrait dire que celui-ci ou celui-là est exactement un ouvrier ou un employé ou un petit bourgeois ? Il y a tant de métiers dans Paris et tant de combines. Et puis sont-ils parisiens ou provinciaux ou étrangers ? Et les femmes sont-elles putains ou autre chose ? Souvent un peu des deux. Le patron faisait aussi le restaurant : il se débrouillait bien et savait que sa clientèle ne pouvait supporter que des prix raisonnables. D’ailleurs, une partie de cette clientèle était en combine avec le patron dans tel ou tel genre d’affaires. Qu’est-ce qu’un bistrot ? C’est une officine où se traitent toutes les affaires matérielles et morales d’un coin de quartier et d’une coterie. Il y a un secret auquel participent plus ou moins tous ceux qui entrent et qui boivent un verre ou prennent leur repas. Il y en a qui