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semblait être aussi du dernier bien avec Susini. La question idiote qui accompagne si souvent une situation sexuelle se posait  : «  Susini sait-il qu’elle le trompe avec Bardy  ? Ou est-ce lui qui trompe Bardy avec elle  ?  » Susini avait beau avoir l’air très libre et très pénétrant, il pouvait être comme les camarades. Cette double liaison devait avoir de l’importance, puisque la plupart des hommes vivent en fonction des femmes.

Le docteur Bardy vint après le déjeuner. Aucune gêne entre les trois personnes, une délicate familiarité. Ce ne fut que quand Bardy fut là que Charles Susini dit à Mme Liassov  :

— Vous savez, Roxane, que Constant Trubert a fait la connaissance de votre mari.

Puis, sans transition, il dit à Bardy  :

— Trubert a bien observé la situation, ici, mais il lui manque le chaînon essentiel  : il ne sait rien sur le dépôt d’armes.

Bardy en eut l’air fort étonné.

— Comment  ! Vous ne lui aviez pas dit  ! Mais il avait l’air de savoir.

— Les gens discrets ont toujours l’air de tout savoir. Donc, mon cher Constant, si Préault et Salis sont extrêmement intéressés par la Maison des Marais, c’est parce que nous avons l’avantage… ou l’inconvénient de posséder quelque part dans les environs un dépôt d’armes. Ce dépôt a été constitué peu après la débâcle de 40 par un homme aujourd’hui disparu  ; il a été pincé dans une autre affaire par les Allemands et fusillé. Préault, qui était un ami de cet homme, a