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ne devait être d’aucun camp ou de tous. Mais, après tout, Constant n’en était pas sûr.

Il ne se souciait pas outre mesure de cette ignorance dans laquelle il restait, car il savait que tôt ou tard, et plus souvent tôt que tard, les hommes les plus concertés se confient ou se livrent. Il ne se passerait pas beaucoup de temps avant que Préault et Salis – et Susini lui-même – ne se déchargent de leur humble secret. Il en était d’autres plus importants pour Constant et la façon concrète dont il les recherchait l’assurait que pour lui l’adage  : «  qui peut le plus peut le moins  » restait exact et que sa familiarité avec les dieux était de tel ordre qu’elle ne le privait d’aucun flair avec les hommes. «  Tu ne peux comprendre les dieux que si tu comprends les hommes. Si tu as si spontanément suivi les Asiatiques, et tous les initiés dans leur dépassement du problème de Dieu, c’est grâce à ce long commerce que tu as eu d’abord avec les hommes et les dieux, avec les animaux et les femmes. L’inverse est vrai.  »

S’il était plus occupé, il n’oubliait pas pourtant les longues promenades, de cela il n’aurait jamais pu se passer. Il n’avait jamais été un plus grand errant qu’après qu’il avait été au bagne, c’était alors que ce grand voyageur était devenu précisément méditatif. La méditation et la marche étaient pour lui la même chose. Qu’il fût dans une grande ville ou ailleurs, il marchait souvent la nuit. Encore maintenant, il ne perdait pas cette habitude et il aimait à déboucher des marais sur les dunes au petit jour. Maintenant qu’