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sacré et définitif sans lequel il lui semblait qu’elle n’aurait pas été vécue et n’aurait pas trouvé son caractère propre d’éternité.

Était-ce pour trouver la piste de cette réalisation que lui qui était fort au-delà du christianisme et bien plus familier de la mystique arabe ou du Védanta que des Pères de l’Église grecque que pourtant il fréquentait encore, relisait depuis quelques temps les Évangiles, avec l’acharnement maniaque d’un lecteur de romans policiers  ?

Constant avait reçu par un messager des instructions de Susini et il avait maintenant quelques randonnées à faire dans l’arrière-pays. Le patron à distance avait perçu que la connaissance avait suffisamment mûri chez son agent.

Celui-ci, à mesure qu’il fréquentait plus Préault et Salis, percevait de mieux en mieux que l’attention qu’ils lui marquaient avait des raisons particulières. C’était naturel  : il était l’agent de Susini. Ils connaissaient sans doute mieux Susini que lui, Constant, ne le connaissait, et ils cherchaient à savoir si vraiment Constant était en dehors de la confidence de son patron, comme il le leur avait nécessairement montré au bout de quelques jours. Constant se demandait de son côté en quoi ils étaient liés eux-mêmes à Susini. Susini était-il un personnage important dans leur camp  ? Mais alors pourquoi cette peur et cette hostilité secrètes  ? D’après ce qu’avait toujours soupçonné Constant, Susini