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rondeur étroite, quand on est dans son plein  : c’est comme la cour d’une prison entourée d’un mur circulaire, avec une cargaison de forçats au milieu. Il aimait mieux la forêt ou le désert. Les déserts étaient les lieux du monde où il s’était trouvé le mieux. Pourquoi les avait-il quittés  ? Il avait à jamais au fond de son âme l’âme du désert. Ces dunes, c’était un peu le désert – ces terrains nus, parlant un langage sobre et net à travers les longues lignes enlacées d’une écriture indéniable. Le désert n’est pas vide, il porte des broussailles qui sont les signes de l’ascétisme. Près d’un gros fortin allemand il aima d’abord surtout la pointe de sable qui était à l’extrémité de la Vère, face à l’usine de M. Préault.

Salis vint le voir. Constant déboucha une bouteille de Cinzano. Susini faisait bien les choses, ici comme ailleurs  : il y avait une bonne réserve d’alcool et de tabac.

— Tu travailles ou tu ne fous rien  ? demanda Salis.

— Je ne fous rien, j’attends Susini qui me fera peut-être travailler.

— Tu as déjà travaillé avec lui  ?

— Oh, oui, depuis plusieurs mois.

— Alors, tu es à la page  ; d’ailleurs, tu devais y être avant.

— Dame.

— Susini ne t’a rien dit de spécial pour ici  ?

Non, mais est-ce que je peux quelque chose pour ton service  ?