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soleil d’octobre dont la souveraineté transfigurait tous les parages. Une partie des hommes de Salis aussi bien que de Bardy s’étaient éclipsés, sans doute travaillaient-ils et avaient-ils été rejoindre d’autres patrons. Les garçons de Cormont semblaient s’amuser de leur escapade et cette journée dans la Maison des Marais était comme une fête dans leur camp. Ils avaient noué avec solennité une flamme tricolore a un barreau de la grille et au moment du garde-à-vous présentèrent quelques-unes des armes prises dans le caveau de Susini. Fascistes et communistes avaient considéré qu’ils auraient pu aussi faire ça eux-mêmes, car rien ne ressemble plus à un ennemi que son ennemi. Juste a ce moment-là, par un miracle de ponctualité, Préault est arrivé. Il avait esquissé le salut militaire, il n’en était pas moins avec les autres contre Cormont. Ce qui était profondément comique et significatif pour Constant, c’était la ressemblance de comportement entre ces hommes si divisés. La plupart des hommes de Bardy étaient d’anciens communistes devenus cagoulards, doriotistes ou francistes. Les communistes étaient devenus impérialistes, nationalistes, militaristes endurcis, attachés à Staline comme les autres à Hitler. Quant aux hommes de Cormont, ils étaient aussi fanatiques que ceux de Salis ou de Bardy, en tout cas aussi entichés de rigueur et d’obéissance aveugle. Tout cela, du reste, chez les uns comme chez les autres, n’était qu’apparence ; ces Français avaient pris des masques aux étrangers pour masquer la mollesse de leur