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Brusquement, il se retourna vers Roxane, en s’écriant :

— Savez-vous que vous êtes bien belle quand vous faites l’amour ?

— Il faut être bien laide pour ne pas être belle quand on fait l’amour. Mais qui le voit ? Les hommes ne vous regardent guère à ces moments-là.

— Mais moi, je vous regarde.

Elle le scruta avec cette curiosité coquette qu’homme ou femme, chacun a pour son miroir ou un regard admirateur.

— Nul sans doute ne vous a jamais admirée comme moi.

— Tiens, tiens.

— Oui, car il m’a été donné de vous voir faire l’amour en plein jour.

Elle eut un bref regard autour d’elle, comme si elle devinait ce qu’il allait dire.

— Oui, ici même, je vous ai vue vous mettre toute nue dans les bras de Bardy.

— Non ?

Elle ne manifestait aucun mécontentement, mais plutôt s’amusait et s’intéressait : elle était sûre du bon effet qu’elle avait produit.

— Oui, je vous ai vue nue, d’une nudité où sans doute aucun homme ne vous a vue, car j’ai vu la nudité de votre visage tout détourné de votre amant et faisant sa confidence à l’invisible.

— Eh bien, vous ne faisiez pas beaucoup de bruit, car je ne vous ai pas entendu. Vous m’aviez suivie ?