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— Encouragé à rien du tout.

Elle avait l’air de dire, ce qui était fort juste, que pour une femme coucher avec un homme n’est pas forcément une preuve d’intérêt. Quel mépris une Russe devait avoir pour tous ces Français. Salis était le valet des Russes, Bardy le valet des Allemands et ce Cormont était un gosse qui n’était pas même capable de réussir une farce. Comme elle devait se sentir d’une autre race. Elle représentait quelque chose qui n’avait pas d’équivalent dans ce pays des Marais, même pas en Constant. Il avait connu la Russie. Il avait soigneusement refusé à ce monde d’entrer dans son monde de dieux nonchalants prêts à se dissoudre devant Dieu, dans son monde d’où Dieu dégoûté de lui-même s’en allait à son tour vers un au-delà bouddhique.

— Alors, vous ne voulez rien faire pour Cormont ? Il est vrai que c’est vous qui l’avez livré à Salis.

Elle le regarda impassible.

— Vous ne trouvez pas, dit-elle sur un ton ironiquement détaché, que Salis est plus intéressant que Cormont ?

— Bah, Salis ne vaut que par vous… vous, les Russes.

Constant s’efforçait de la provoquer, mais elle résistait. Elle ne s’émouvait pas plus pour Salis que pour Cormont.

— Tandis que le pauvre Cormont n’a rien derrière lui que les Français, et encore.

Elle sourit imperceptiblement : « Au fond, songea Constant, elle est aussi indifférente que moi