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de ce qu’il avait dit devant Roxane sur leur fuite possible. Du moins Constant comprit cela au bout d’un moment, en réfléchissant. Donc, Susini pensait que Roxane était de mèche avec Salis.

L’attente fut longue. Salis marchait de long en large, carrant ses épaules étroites mais pleines dans son gros chandail roulé au cou. Roxane fumait. Constant la regardait. Avec sa misogynie, il se demandait ce qui pouvait se passer dans la tête de cette femme qui faisait de la politique. Elle lui paraissait moins belle depuis que le danger avait frappé à la porte. « Ainsi donc, songeait-il, on reste toujours le même. La bête est presque aussi nerveuse dans ma carcasse de cinquante ans que dans mon ancien corps de godelureau. Au fond, j’étais plus sûr de moi quand j’étais dans les méharistes. Ce serait le moment de faire un petit exercice de yoga, mais va te faire foutre. Qu’est-ce que le Salis va vouloir faire de Cormont ? Lequel est-ce que je préfère ? Cormont est le jeune premier, j’ai toujours eu en horreur les jeunes premiers. Et pourtant… »

Enfin, il sembla que la chose se passait. On entendait des voix et les yeux verts de Salis se dilatèrent. Susini entra avec Cormont. Celui-ci se doutait de la bêtise où venait de l’introduire Susini ou il s’en douta en voyant Salis. Constant songea : « Les jeunes en France se font toujours rouler par les vieux. Du reste, ils aiment mieux ça, ça leur épargne d’être jeunes. » Cormont lut quelque chose d’autre sur le visage de Constant, un