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moments perdus. Il permettait certainement à la politique de prolonger certaines avenues de son système intérieur.

Constant les attaqua directement comme il n’avait jamais fait jusqu’ici, mais auparavant il avait préparé le terrain.

— Croyez-vous que l’Angleterre et l’Amérique, ou l’une des deux, souhaitent la destruction totale de l’Allemagne ?

Liassov sourit sans ironie :

— Les marxistes (mais y a-t-il encore des marxistes ?) ont dit que le fascisme n’était qu’un moyen de défense et un camouflage pour le capitalisme. Il est curieux de voir que le capitalisme n’a de cesse de se débarrasser de ce camouflage et de se montrer nu devant le communisme.

— Bah, il y a encore un vêtement de dessous, la démocratie.

— Si transparent, si facile à déchirer.

— Cela dépend des pays. Dans les pays de formation vraiment germanique et protestante, la démocratie est un vêtement solide, presque une armure, parce que c’est une démocratie modérée avec des éléments autoritaires profondément balancés, dissimulés et hypocrites. En fait, dans ces pays-là, il n’y a pas démocratie mais libéralisme, c’est tout à fait différent.

— Ah, vous êtes de mon avis : l’Allemagne est à demi slave, c’est pourquoi elle n’a pas pu plus que la Russie acclimater le libéralisme.

— La France souffre de la démocratie, c’est un pays qui oscille sans cesse entre l’anarchie et la dictature policière. Ce n’est pas un pays libéral,