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appuyer le nationalisme français à un autre nationalisme. Pendant des années j’avais pensé à l’appuyer au nationalisme anglais.

— Les pauvres nationalismes européens sont si exaspérés, si épuisés, qu’ils devraient s’appuyer les uns aux autres.

— L’Angleterre est tellement distraite et écartée de l’Europe par les intérêts de son Empire ; et puis les Anglais en étaient encore à une conception des choses hypocritement libérale qui est complètement morte pour moi : je me suis donc trouvé aussi étranger aux Anglais qu’à la plupart des Français.

— Salis aussi leur est étranger.

— Oui, mais le communisme a l’air d’être la continuation d’une vieille pensée française. Les Juifs ont l’art du camouflage ; ils camouflent admirablement la pensée terriblement réactionnaire (par rapport au XIXe, dans le langage du XIXe qu’est la pensée russe, qui elle-même est félinement inconsciente de son ambiguïté. Il faudra que les Russes soient ici, qu’ils viennent jusqu’à ces marais pour que les Français aient la révélation de l’abîme qu’il y a entre la réalité russe et les mots qui pour eux la recouvrent.

Ils en mourront, je crois, s’écria Constant avec une voix soudainement sarcastique.

Bardy le regarda avec surprise :

Mais vous êtes aussi passionné que moi et dans le même sens, Trubert.

Le visage de Canstant Trubert n’avait pas remué.

— Non, reprit-il d’une voix calme. Mais, bien que