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que la science de son temps n’embrassait pas aussi largement que la nôtre. Le monde antique a connu le sens du péché et avant de tomber en décadence, c’est pourquoi il a engendré le christianisme. Le sens du péché n’est une particularité pour personne. Les Juifs, qui sans doute ne l’ignoraient pas par eux-mêmes, l’ont trouvé sous une forme prodigieusement développée chez les Aryens par excellence, chez les Iraniens, les Perses. Les Aryens de l’Inde aussi ont connu le péché, mais sous une autre forme, beaucoup plus profonde d’ailleurs, non plus morale mais cosmique.

Pour eux, le péché comme d’ailleurs pour les initiés de l’Occident c’est l’éloignement du monde de son centre divin, c’est le tourment, délicieux, qu’engendre l’articulation du Verbe sur l’indicible.

Le jeune Allemand de la Kommandantur qui était là s’écria :

— Le monde antique dont vous parlez était le monde méditerranéen. En effet, pas de solution de continuité entre le VIe siècle avant Jésus et le VIe siècle après. Pourtant, au temps de l’Iliade, les Grecs n’étaient pas encore méditerranéens, ou à peine, et il y a des traces de pureté jusque chez Pindare et Eschyle.

— Bah, il y en a même chez Platon. Par le côté politique, Platon était un spartophile, comme Bardy ici présent est un germanophile ; dans la République on voit que Platon avait gardé intact l’idéal guerrier des Aryas : un communisme aristocratique.

— Mais, reprit le jeune Allemand, il y a un monde