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philosophe ; nous voici revenus à l’époque originelle, où la vie humaine n’avait pas plus de valeur que celle d’un vertébré quelconque. Mais quel coup de fouet pour l’intelligence d’une race ! voyez, tous ces efforts inspirés par la peur ! Des découvertes extraordinaires attendent dans toutes les branches de la science, l’humanité reconstituée, et quand ce sera fini on pourra clore l’ère moderne, comme on a clos le Moyen Age à la prise de Constantinople. Une ère nouvelle commencera, à laquelle il faudra trouver un nom nouveau.

— Oui, mais quelles ténèbres vont de nouveau épaissir le vieux continent, si ces musulmans triomphent ! c’est la marche en avant de la civilisation retardée de deux siècles.

— Pas du tout : l’Amérique n’est-elle pas là pour la continuer, et même bénéficier de nos recherches ? et puis Omar est intelligent ; il est homme à la reprendre, cette civilisation, au point où nous l’aurons laissée, et à la faire progresser pour le compte des siens.

— Tu plaisantes agréablement : Omar avec tout son pouvoir et le prestige qui s’attacherait à lui en cas de victoire, ne pourrait jamais faire qu’une race rétrograde ou stationnaire, comme celle qu’il traîne derrière lui, prenne notre succession.

— Non, mais il emploiera l’Européen comme esclave ou converti, et les siens jouiront pendant que les nôtres travailleront.

— Douce perspective ! ce sera le cas de nous en remettre de nouveau à ce brave Galette-pacha, du soin d’adoucir notre destinée.

— En attendant, préparons-nous à partir, car c’est pour demain soir : qui sait si nous n’allons pas le revoir ?

— Oui, qui sait ?

Pauvre Omar ! les deux amis ne se doutaient guère que le jeune prince, à qui la malédiction paternelle avait enlevé commandement, titres et autorité, était à cette heure perdu comme simple soldat dans l’armée musulmane.

Le lendemain matin de bonne heure, Zahner abordait Mata et lui disait en arabe :

— Sais-tu, Mata, que nous allons partir ?

— Partir, Sidi, et moi ?

— Toi tu vas rester : n’es-tu pas bien ici ?