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jusqu’à l’entrée de la cabine de l’interprète, filtrant sous la porte.

Le pauvre quartier-maître avait dû entrer dans la mort sans aucune espèce de transition.

Décidément, répéta l’interprète à mi-voix, cette charge-là est bien gênante ; ces gens-là sont capables de se venger de moi en nous donnant la peste il faut nous en débarrasser sans retard.

Mais c’était plus facile à dire qu’à faire. Descendre en ce moment, c’était s’exposer à rencontrer des partis musulmans, car au-dessous de la nacelle, les deux villes principales du M’zab, curieusement rapprochées, Gardaïa, Metliti et, plus loin, Guerrara, se dessinaient avec leurs maigres oasis au milieu de l’aridité des sables leurs hauts minarets ne se devinaient que par le cône d’ombre qu’ils projetaient sur le sol.

Rapidement l’aérostat les dépassa.

Puis, l’orientation étant donnée, la marche fut reprise.

Quand le soleil s’abaissa vers l’horizon, après une marche ininterrompue de plusieurs heures, l’interprète fit de nouveau le point, car il ne lui avait pas été possible, comme en France, de suivre sur une carte le tracé de sa marche. Aucune carte n’existait encore de cette région désolée, où les kilomètres ressemblent aux kilomètres.

Le sextant donna 23°33′ de latitude et 5° de longitude. L’aérostat passait donc au Tropique du Cancer, c’est-à-dire franchissait le cercle parallèle à l’Équateur terrestre, regardé comme la limite commune entre la zone tempérée et la zone torride.

La distance parcourue était de 1.040 kilomètres.

Sans autre expérience, l’interprète exécutant la manœuvre du ballon, était arrivé à lui faire produire une vitesse de 108 kilomètres à l’heure.

Dès lors, la confiance du nouveau maître du Tzar fut entière.

Seulement il était prudent de descendre à terre avant la nuit et d’attendre l’aurore pour repartir.

Saladin se rapprocha du sol : il planait au-dessus d’un terrain sillonné d’érosions granitiques et qui paraissait faire partie d’une ligne de partage des eaux, car trois grandes