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— Je vais trahir un secret en vous donnant une autre raison de son refus, sir James : le Pôle-Nord va être construit en France ; M. Julliot est déjà à Moissons pour le commencement des travaux et c’est un ballon français qui cette fois ira au Pôle, ne vous en déplaise… Il me parait plus loyal de vous en informer…

L’Américain parut atterré.

— Et moi qui voulais faire un nouveau pari d’être au Pôle en ballon l’an prochain, murmura-t-il.

— Eh bien, sir James : allez-y dans le ballon de M. Lebaudy. Je me charge de vous y faire réserver une place.

Mais le milliardaire secoua la tête.

— Non, fit-il, cette solution est indigne de notre grande Amérique… Je vais chercher un autre inventeur, Capazza par exemple, dont le ballon lenticulaire me paraît d’une remarquable ingéniosité. Ou encore je vais essayer du nouvel aviateur de nos frères Wright ; il peut porter quatre personnes et n’est pas, lui, à la merci d’une fuite d’hydrogène…

— C’est vrai, sir James, mais il est à la merci d’un boulon qui casse ! ou d’une hélice qui file… on l’a bien vu !…

— Qui ne risque rien n’a rien ! clama le milliardaire. C’est le drapeau étoilé qui doit être planté là-bas le premier, et il le sera. Hurrah pour la libre Amérique !

Et mistress Elliot prit aussitôt sa Bible pour y trouver dans le livre du prophète Isaïe une prédiction adéquate.