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le docteur Petersen se sentait l’âme gonflée de regrets. Que de sujets d’études, que d’embryons de découvertes lui échappaient à tout jamais !

Que ne pouvait-il s’arrêter au milieu de ce chaos, où le malheureux nègre allait mourir de faim et de froid, et y surprendre les secrets de la formation des icefields, des débâcles polaires et des dérives sous-marines !…

Malgré les travaux de Tyndal et des savants qui l’avaient précédé, l’étude glaciaire ne pouvait avoir son contrôle qu’au Pôle même. C’est dans ces lieux, temoins actuels de la période glaciaire qui a joué un si grand rôle dans l’histoire physique du monde, que sont déposées les clefs de nombreux mystères géologiques.

Et l’âme du savant se teintait de mélancolie à la pensée qu’il en passait si près sans pouvoir les saisir.

Cette mélancolie, chez Christiane, était devenue un profond serrement de cœur depuis l’abandon de Bob Midy.

Que le milliardaire eût eu la barbarie de payer leur salut à tous d’une vie humaine, c’est ce que sa généreuse et enthousiaste nature se refusait à comprendre, encore moins à accepter. Sa chaude imagination lui montrait le malheureux errant parmi les névés et les toross, cherchant le ballon à l’horizon et, dans sa naïveté ignorante, s’imaginant peut-être qu’on viendrait le rechercher.

Le ballon montait…