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« Le vôtre ! »

Le milliardaire se tut. Il avait parlé avec une chaleur entraînante et on sentait que cette question lui tenait à cœur par-dessus toutes les autres et qu’il donnerait ses millions pour voir son nom à lui gravé à côté de celui d’un Peary ou d’un Nansen.

Silencieux, Georges Durtal regardait le point sur lequel sir James Elliot venait de poser le doigt.

Lui aussi se sentait transporté vers un idéal nouveau.

Il ne disait plus : « C’est fou », il ne disait pas non plus : « c’est impossible ! », car il connaissait son dirigeable et ce qu’il en pouvait attendre.

« Il se répétait :

« Trente heures !

« Il suffit de trente heures pour atteindre ce point mystérieux vers lequel ont convergé tant d’héroïsmes et de sacrifices.

« Un oui, et trente heures après, c’est un nom français qui s’inscrira ici, triomphalement, en tête de tous ces noms…

« Pour ne pas répondre ce « oui » aux pressantes instances de sir Elliot, il avait besoin de se répéter, comme un leitmotive :

« Je n’ai pas le droit de disposer du Patrie, je n’ai pas le droit de risquer sa perte dans une expédition que l’État français n’aurait jamais songé à me confier. »

Et, partagé entre toutes ces pensées contradictoires, il ne répondait pas.