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D’ailleurs, manomètre et index disparaissaient à vue d’œil sous l’épaisse couche de givre qui se formait à la surface de l’appareil, dénotant à l’intérieur la présence d’un effroyable froid.

A peine l’officier eut-il ouvert une issue au gaz, que le manchon de soie s’enfla soudain, arrondi, gonflé a bloc. Un jet bruyant venait de tendre l’étoffe avec violence, et Georges Durtal eut un instant la mortelle angoisse de la voir éclater. Le manchon n’était pas fait évidemment pour des pressions semblables.

Il résista néanmoins, et maintenant, le gaz, délivré de cette prison où, depuis treize ans, il était tenu captif, fusait vers le Patrie avec une incroyable rapidité…

On vit presque aussitôt l’enveloppe de l’aérostat se tendre, et, afin de permettre à l’hydrogène de prendre la place de l’air qui avait été envoyé en excès dans les ballonnets pour maintenir au Patrie la permanence de sa forme, le lieutenant aérostier déclencha l’une des deux soupapes inférieures qui, au-dessus de leur tête, en permettait l’évacuation.

Cette opération faite, il n’y avait plus qu’à attendre.

— Si le vent nous en laisse le temps, nous sommes sauvés, fit Georges Durtal en se rapprochant de Christiane..

— Et sauvés par Andrée, fit-elle… Pauvre Andrée ! C’est un legs qu’il nous a laissé en mourant.

Et comme si une idée subite lui fût venue :