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son lourd adversaire et avait, sinon tenu en respect, du moins étonné celui-ci pendant quelque temps. Il n’avait osé s’enfuir, sentant qu’il serait promptement rejoint, et finalement avait été jeté à terre d’un coup de patte.

Mais, à ce moment, l’ours s’était acharné sur les épaisses fourrures dont il était revêtu, et l’Américain, le saisissant par le cou, avait pu tenir éloignés de son visage les formidables crocs et gagner ainsi les quelques minutes qui avaient permis au salut d’arriver.

— Et ce salut, commandant, poursuivit l’Américain, ce salut, le croiriez-vous ? j’étais sûr qu’il viendrait. Je ne vous voyais pas, je ne vous entendais pas, et cependant, dix minutes après mon départ, je vous devinais derrière moi. Je me hâtais, vous sentant plus jeune, plus leste… Ai-je été assez stupide tout de même !…

Et sir Elliot, allant ramasser son pavillon, le regarda longuement.

— Oui, stupide et, ce qui est pire, incorrect, ajouta-t-il en serrant à nouveau la main du jeune homme… Incorrect d’avoir eu la pensée de prendre l’avance sur vous, au moment où votre sang-froid venait de nous sauver tous.

Me le pardonnez-vous ?

— De tout cœur, sir James… Allez, je comprends le sentiment qui vous poussait, il est réellement humain. Mais ce n’est pas moi que vous devez remercier, c’est mademoiselle de Soignes… Sans