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qu’ils calmèrent instantanément la fièvre qui aurait pu faire dévier la balle de Georges Durtal.

À moins de deux mètres il épaule et, comme à la cible, visa la gueule ouverte de l’animal ; puis il lâcha la détente.

C’était une balle explosible ; le coup s’en répercuta au loin : la tête du fauve éclata comme une grenade mûre et il s’abattit tout d’une pièce sur l’Américain, qui poussa un han étouffé.

Ce ne fut pas sans peine que Georges Durtal le sortit de cette critique position. Mais sa surprise fut extrême en le voyant, dès que le cadavre de l’ours eut été tiré de côté, se relever prestement et se jeter dans ses bras.

— Ah ! commandant !… sans vous…

Et avec une effusion dont, à son flegme habituel, on ne l’eût guère cru capable, le milliardaire serra le jeune homme dans ses bras.

Il n’avait pour toute blessure qu’une large estafilade à la joue droite ; encore le sang s’était-il congelé de suite et on n’en voyait que la cicatrice.

Quand il fut en état de parler, l’Américain explosa en un torrent d’explications.

C’était le drapeau américain d’abord, ensuite sa lourde pelisse, qui l’avaient sauvé.

L’ours était arrivé derrière lui, à l’improviste, mais il avait senti son souffle bruyant, s’était retourné à temps et avait évité sa première attaque.

N’ayant pas d’autre arme que le pavillon de l’Étoile polaire, il l’avait agité frénétiquement devant