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Durtal à cette sorte d’exaltation, d’attendrissement qui suit les catastrophes évitées.

Christiane et lui se regardent sans mot dire, comme étonnés d’être là, mais c’est une extase de quelques secondes à peine. Le sentiment de sa responsabilité revient au commandant du Patrie. Il a recouvré, sinon la souplesse, du moins l’usage de ses membres, et d’ailleurs le froid, tombé de 58 à 32°, n’est plus du froid. Ce qui provoquait la souffrance et la paralysie, c’était, au moins autant que le formidable abaissement de température, le violent courant d’air provoqué par la marche du ballon. Maintenant que l’air est calme, il n’y a plus sensation de froid.

Nansen raconte que, pendant son séjour de deux ans sur la banquise, il vit maintes fois Hansen, le lieutenant du Fram, se lever la nuit en manches de chemise et, constatant qu’il n’y avait pas de vent, monter sur le pont pour consulter les instruments, par 36° de froid.

Georges Durtal est d’ailleurs dans un état physiologique tel que, seule, cette idée de la soupape ouverte et qu’il faut refermer à tout prix, le sollicite.

Il écoute le bruit sinistre, et se creuse pour trouver une solution.

Sa lourde pelisse de fourrures l’engonce, lui pèse ; il s’en débarrasse, sort de la nacelle, court à l’aérostat qui se plisse à vue d’œil, et en fait le tour.

Comment la soupape est-elle restée ouverte ? Bob a dû tirer trop brusquement la corde.