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dans le Congo français, avant d’installer sur la rive droite du grand fleuve la station de Brazzaville.


« Tu t’étonneras de me savoir ici, écrivait le jeune officier de la légion : tu seras plus étonné encore en apprenant que j’y remplace ce pauvre Zalmer qui n’a pu résister au climat et que j’ai embarqué, il y a trois mois, pour la France, très anémié. J’étais resté en correspondance suivie avec lui.

« C’est lui qui, se sentant malade, m’a proposé à M. de Brazza pour remplir le poste de commandant d’escorte qu’il était obligé d’abandonner.

« J’ai accepté : ma santé est, je l’espère, à l’abri des fièvres, et comme je ne vois aucune expédition coloniale en perspective pour le moment, j’ai voulu connaître d’autres régions que le Sud Oranais. Ce n’est pas toi, grand voyageur, qui me désapprouveras. »


Le jeune officier exposait ensuite en détail à son ami les péripéties du voyage d’exploration qu’il venait d’effectuer, dans ce pays soumis à la France, sans qu’un seul coup de fusil eût été tiré. Il lui racontait en particulier la manière adroite dont M. de Brazza s’était attiré l’alliance et l’amitié du roi Makoko, chef de la puissante tribu des Batékès.

Quand l’exploration serait terminée, le petit Andrit reviendrait à la côte, et probablement accompagnerait en France le chef de l’expédition, qui devait y faire ratifier par les Chambres les traités passés au Congo.

En terminant, Émile Andrit demandait à Georges de lui écrire longuement, et notre ami, confus de n’avoir pas mieux tenu la promesse faite à son camarade de promotion, lui écrivit avant de s’embarquer une longue lettre, dans laquelle il ne put s’empêcher de lui raconter en détail l’idylle qui s’était ébauchée pour lui au Soudan et la déception qui l’avait terminée.

Le 10 juillet 1882, Georges Cardignac arrivé par le transport la Loire, en rade d’Alexandrie, montait à bord du cuirassé le Redoutable, sur lequel était formée la compagnie de débarquement dont il faisait partie.

En route, il avait appris que la démonstration navale, faite par la France et l’Angleterre, avait pour but d’obliger le Khédive d’Égypte à renvoyer son Ministre de la guerre, un certain Arabi Pacha, dont le programme, résumé dans ces deux mots « l’Égypte aux Égyptiens », consistait à éloigner les Européens de toutes les charges qu’ils occupaient dans l’administration égyptienne.