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— À bientôt, Pépin ! dit Georges en serrant chaleureusement la main du sergent : je te verrai au quartier demain ; mais quand je serai installé, tu viendras me voir chez moi… et souvent.

— Ah ! pour sûr, mon lieutenant, si ça ne vous ennuie pas, nous recauserons d’autrefois et je vous amènerai mon mioche.

— Ton mioche ! tu es donc marié, toi ? Pourquoi ne le disais-tu pas ?

— Vous verrez ça, mon lieutenant ; c’est une surprise ! Mais Georges venait d’apercevoir Yvan Mohiloff, debout derrière lui, les valises à la main.

— Tiens, Pépin, reprit-il, rends-moi un service : occupe-toi de ce brave garçon : c’est un engagé qui entre au régiment. Demande au major, de ma part, de l’incorporer à la 14e avec moi : je tiens à ce qu’il ne me quitte pas.

— Entendu, mon lieutenant ; soyez tranquille, je m’en charge : je vais trouver le sergent-major, et il sera habillé et ficelé comme pas un d’ici à demain.

— Tu le feras mettre dans une escouade où on le laisse un peu tranquille et dont le caporal soit sérieux.

— N’ayez crainte, mon lieutenant : je vais le prendre dans ma section, et c’est moi-même qui le mettrai au port d’armes. Ne sera-t-il pas votre ordonnance plus tard ?

— Justement, il ne s’est engagé que pour cela.

— Diable, vous serez bien partagé ! il a l’air fort comme un taureau, ce gaillard-là. Ça fera un rude marsouin, quand je l’aurai débrouillé, et c’est précieux aux colonies, une ordonnance comme celui-là.

Laissant celui que l’on appelait toujours le « Petit Russe », et qui en réalité était un hercule râblé et musclé, aux soins de Parasol, Georges Cardignac rejoignit Zahner et son ancien.

L’accueil du colonel fut celui qu’avait fait présager sa lettre si affectueuse.

Le colonel Mangin était un petit homme nerveux, vif, tout d’une pièce, et qui secoua vigoureusement la main du jeune officier.

Mais ce fut surtout chez le capitaine Cassaigne que l’accueil fut chaud.

Georges faillit étouffer de l’accolade qu’il reçut, et il s’aperçut que cet officier, qui lui était apparu si calme pendant l’infernale tempête de Sedan, était au contraire, dans la vie privée, un cœur chaud, exubérant, plein d’en-