CHAPITRE VI
première épaulette
S’il est un nom qui sonne doucement à vos oreilles, mes enfants, c’est certainement celui de « vacances » ; les plus petits d’entre vous le connaissent ; les plus grands, ceux qui songent déjà aux terribles examens de fin d’études, le voient revenir chaque année avec une joie profonde. C’est que le fabuliste l’a dit : « l’arc ne peut toujours être tendu », et il faut donner à l’esprit comme au corps sa détente et son repos.
Or il n’est pas d’adolescent qui apprécie la douceur de ce mot plus que le Saint-Cyrien sortant de l’École. Ces trois mois qui s’écoulent entre son dernier examen et son entrée au régiment, ce sont ses dernières vacances ; après elles, il n’aura plus que des « congés » ou des « permissions ».
C’est peut-être l’époque la plus heureuse de sa vie ; pour la première fois, il se sent libre ; plus de règlement ni de consignes ; plus de tâche obligée ; plus de soucis d’examen ; plus d’autorisations à demander ; plus de comptes à rendre. L’avenir, il le voit tout en rose, et, en effet, ne s’ouvre-t-il pas brillant, sans entraves, devant lui ? Aussi le jeune homme est-il, à cette heure heureuse entre toutes, comme l’oiseau qui s’échappe du nid pour la première fois : grisé de lumière et se sentant des ailes, il reste là, perché au bord de ce nid, et avant de s’élancer dans l’espace, il chante au soleil.
Dans quelques semaines il sera appelé à faire œuvre d’homme ; en attendant, il s’éveille à cette vie nouvelle avec les illusions et les espérances de