Page:Driant, Histoire d’une famille de soldats 3, 1904.djvu/126

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

huit !… Seulement les deux chevaux de tête ont eu leurs traits coupés ! Ils ont dû perdre des pièces quelque part, et on a ajusté les chevaux en excédent aux pièces qui restaient pour donner le change[1].

Le petit-fils de Jean Tapin avait vu juste : ces troupes qui rentraient précipitamment à Dijon venaient d’être battues à Nuits par la division du général Cremer.

Le bruit s’en répandit bientôt dans la ville, car plusieurs Allemands n’avaient pas été aussi discrets que leurs chefs vis-à-vis de leurs hôtes, et bientôt une rumeur joyeuse circula de maison en maison.

C’est qu’à cette époque, au cours de ces épreuves terribles que traversait la France, le plus léger succès emplissait les âmes d’allégresse et d’espoir !

Or Gambetta, qui, de Tours, dirigeait en quelque sorte à lui seul la défense, tout en s’entourant des conseils d’officiers généraux, Gambetta, disons-nous, avait songé à tenter, sur le flanc gauche des Allemands, un mouvement tournant qui, s’il eut réussi, eût certainement donné des résultats importants.

Un coup d’œil d’ensemble sur la carte de France, que vous devez déjà connaître fort bien, mes enfants, vous permettra de vous rendre compte de l’état des opérations à la fin de 1870.

Au nord, Faidherbe, avec l’armée du nord, maintenait l’aile droite des Allemands, et devait même leur infliger, le 3 janvier 1871, un sérieux échec à Bapaume.

Au centre, Paris investi résistait, et par suite immobilisait une très importante fraction des assaillants.

Mais la capitulation de Metz, le 24 octobre 1870, avait permis aux Allemands de disposer des troupes que la résistance prolongée de Bazainc eût retenues en Lorraine.

Ces troupes étaient donc venues renforcer les autres sur la Loire, et le général Chanzy se voyait contraint de reculer — non sans gloire — sur le Mans.

Au sud, l’armée des Vosges avait été, elle aussi, refoulée — ainsi que vous l’avez vu ; — mais le gouvernement de la Défense Nationale, dont M. de Freycinet (vivant encore aujourd’hui) faisait partie, avait, non sans raison,

  1. Historique.